Le Docker noir

Parution le 2 juin 2023

Marseille, années 1950. Diaw Falla, docker sénégalais, vit à Belsunce, le «petit Harlem marseillais», et travaille sur le port en compagnie de nombreux ouvriers africains. Menant une existence précaire, il rêve d’écrire et de publier son premier roman, Le Dernier voyage du Négrier Sirius. Son existence bascule le jour où il confie son manuscrit à une amie écrivaine.

Publié en 1956, ce premier roman de Sembène Ousmane est un déchirant cri d’amertume qui fait écho aux romans marseillais de Claude McKay dans sa soif de liberté, sa défense des luttes sociales et son refus d’accepter l’étroitesse des préjugés raciaux.

Le Docker noir résonne également avec Native son de Richard Wright et L’Étranger d’Albert Camus, dans sa description d’un personnage moins condamné pour son délit que pour ce qu’il représente aux yeux de la société française de l’après-guerre. Cette édition est enrichie d’archives, d’écrits poétiques inédits et de contes écrits par l’auteur à Marseille.

L'auteur

Sembène Ousmane est né en Casamance en 1923. Tour à tour mécanicien, maçon et tirailleur dans l’armée coloniale, il débarque clandestinement à Marseille où il devient docker. Son séjour dans la ville (1946-1960) est une étape décisive d’intense activité militante et intellectuelle. Il y écrit ses trois premiers romans et participe activement aux activités de la CGT, du parti communiste, de la FEANF ou du MRAP. Son retour en Afrique marque le début d’une riche carrière cinématographique et littéraire. Sembène Ousmane est décédé en 2007, laissant derrière lui une œuvre insoumise, au service d’une Afrique libre.

De nombreuses archives et des textes inédits

Cette édition, enrichie d’un important appareil critique, retrace le parcours de Sembène Ousmane à Marseille, à travers les réseaux politiques et littéraires qu’il a fréquentés. C’est ainsi qu’apparaissent dans cette version les poèmes « Liberté » (publié dans la revue Action poétique en 1956), « Sur toute la terre », « Vu du coeur » et « Manie », ainsi qu’une des premières versions de la nouvelle « Communauté ».

Dans la postface, on apprend, grâce aux informations révélées par les archives des Renseignements généraux, que Sembène était étroitement surveillé en raison de ses activités militantes en faveur des indépendances africaines. 

 

Au début de ce siècle, la ville de Marseille ne comptait qu’une petite douzaine d’Africains. Peu à peu, ils sont devenus plus nombreux. Aimant vivre en communauté, on les voyait en groupes sur la place Victor Gélu, dans ce qui fut le vieux quartier, avec ses rues sordides, cellulaires, en cul de sac. La Deuxième Guerre mondiale vit le vieux Marseille à moitié détruit. Quelques uns partirent pour la Grande-Bretagne. Le reste s’enfonça dans la ville? Et lorsque prirent fin les hostilités, leur nombre augmenta; de tous les côtés affluaient des hommes de couleur, poussés par les vicissitudes de la vie et de la navigation… Unis par un esprit de communauté, de solidarité, ils formèrent ce village… La plupart sont des marins accomplis, chacun ayant au moins deux tours du monde dans son sac.